L'établissement français (1608-1763)Le comptoir de Québec
En juillet 1608, Samuel de Champlain débarque au lieu-dit Québec. À la demande de Pierre Dugua, sieur de Mons, détenteur d'un monopole de commerce, il vient établir un comptoir de traite des fourrures. Le site choisi semble idéal. Du haut du promontoire, le cap Diamant, il est facile d'observer et de contrôler les allées et venues sur le fleuve Saint-Laurent. À cet endroit, celui-ci n'a qu'un kilomètre de largeur. Le mot Kebek signifie d'ailleurs, en langue algonquienne, « là où c'est bouché », là où le fleuve rétrécit. En plus de présenter un intérêt stratégique, la pointe de Québec est dotée d'un havre naturel et elle est déjà fréquentée par des groupes d'autochtones.
Champlain fait construire une Abitation de bois qui sert à la fois de résidence, de fort et de magasin pour les marchandises de traite, la nourriture et la fourrure. Une palissade de pieux, des canons, un fossé et un pont-levis en protègent l'accès. Dès 1609, des groupes d'Amérindiens y viennent régulièrement échanger des fourrures contre des produits européens. Québec devient aussi un point de ralliement missionnaire avec l'arrivée des Récollets en 1615. Un fort, construit sur le cap, marque la naissance de la Haute-Ville. Cependant, vingt ans après sa fondation, Québec ne compte encore que 72 habitants.
Une ville, une mission et des seigneuries
À partir de 1627, la compagnie des Cent-Associés devient responsable du peuplement de la colonie. Elle nomme Charles Huault de Montmagny au poste de gouverneur. Il doit transformer le comptoir de Québec en une ville. Dès son arrivée, en 1636, il fait tracer de nouvelles rues et la première artère extérieure, le grand chemin de Cap-Rouge ou chemin Saint-Louis. Sur le promontoire, il veille à la construction de l'église Notre-Dame-de-la-Paix et à celle du château Saint-Louis, résidence des gouverneurs et centre de l'administration. Tout près, les Ursulines, les Augustines et les Jésuites fondent les premières institutions de la colonie, deux écoles et un hôpital. L'activité commerciale reste concentrée à la Basse-Ville, près du port du Cul-de-Sac.
Une disposition de la charte de la compagnie des Cent-Associés prévoit l'instruction des Autochtones à la foi et à la religion catholiques. Les Jésuites s'y emploient dès 1637 en établissant une mission à une lieue de Québec, dans une anse où les Algonquiens pêchent l'anguille. La terre accordée par Noël Brûlart de Sillery portera son nom. À leur arrivée, c'est là que les Augustines ouvrent le premier hôpital. Toutefois, devant la menace iroquoise, le gouverneur les rappelle à Québec. La mission Saint-Joseph poursuivra ses activités jusqu'à la fin du siècle.
Les environs de Québec se peuplent. Le territoire est divisé en seigneuries qui s'étendent en bandes parallèles le long du Saint-Laurent, principale voie de communication. D'est en ouest s'alignent les seigneuries de Beauport, Notre-Dame-des-Anges, Saint-Ignace, Sillery, Saint-Gabriel (au nord de la précédente), Gaudarville et De Maure. Elles couvrent tout le territoire de l'actuelle ville de Québec, depuis Beauport jusqu'à Saint-Augustin-de-Desmaures.
Malgré la menace iroquoise – des colons sont massacrés à Cap-Rouge et à Sillery –, les immigrants préfèrent la campagne à la ville. La possession d'une terre permet de subsister et de constituer un héritage. En 1663, environ 550 personnes vivent à Québec, tandis que l'arrière-pays compte 1 400 habitants.
Ville et campagne, un lien d'interdépendance
Québec accède officiellement au rang de capitale de la Nouvelle-France en 1663. Lieu de pouvoir, centre administratif, judiciaire et commercial, la ville joue aussi un rôle important sur le plan religieux. Le Séminaire de Québec y forme tous les prêtres de la colonie, et la ville devient le siège de l'évêché de Québec en 1674. Le diocèse s'étend sur toutes les possessions, présentes et futures, de la couronne de France en Amérique du Nord.
À partir du moment où le roi Louis XIV s'intéresse à la Nouvelle-France, le peuplement progresse.
À la fin du Régime français, le territoire de l'actuelle ville de Québec forme un paysage de contrastes saisissants. Boisés, villages, champs en culture et pâturages entourent la ville de 8 000 habitants. Celle-ci se démarque par son architecture monumentale, ses fortifications, ses rues boueuses et insalubres, ses riches maisons de maçonnerie et ses bicoques des faubourgs Saint-Jean et Saint-Roch. Malgré son urbanité et son statut de capitale, Québec reste une petite ville coloniale liée étroitement à l'arrière-pays. Les habitants viennent s'y procurer des marchandises de France et vendre leurs surplus agricoles et du bois de chauffage aux deux marchés de la ville.
La Conquête britannique
Une imposante flotte britannique jette l'ancre près de Québec en juin 1759. Tout le territoire est en état d'alerte. La côte de Beauport, où les Français attendent un débarquement, est fortifiée. La ville est bombardée sans relâche à partir du 12 juillet. Plus de 200 maisons sont détruites. À la suite d'une victoire française sur la rive droite de la Montmorency, le commandant des forces britanniques, James Wolfe, tente le tout pour le tout : le 13 septembre, ses troupes débarquent à l'Anse-au-Foulon. Elles escaladent la falaise, occupent les hauteurs d'Abraham et remportent une victoire décisive sur l'armée française. Cinq jours plus tard, la capitale de la Nouvelle-France capitule.
En avril 1760, le maréchal de Lévis remporte la bataille de Sainte-Foy. Cependant, l'arrivée de renforts britanniques oblige l'armée française à se replier sur Montréal qui capitule à son tour, en septembre 1760. Trois ans plus tard, la plupart des possessions françaises d'Amérique du Nord sont cédées à la Grande-Bretagne. L'ancienne capitale de la Nouvelle-France devient celle de la « Province of Quebec ».
Louise Côté
Historienne