Et si la Lune était mouillée
La Lune n’est pas aussi desséchée qu’on le pensait: elle a été riche en eau dans le passé, et des traces ont subsisté jusqu’à ce jour à sa surface. C’est ce qu’a démontré une équipe internationale de géologues dans une étude publiée mercredi par la revue « Nature ». Cette découverte pourrait remettre en question les théories actuelles sur l’origine de l’eau terrestre.
Verres de lune
Un groupe de géologue mené par Alberto Saal de la Brown University de Providence (Etats-Unis) a analysé la composition chimique des échantillons de roches volcaniques appelées «verres» collectées lors des missions Apollo 11, 15 et 17. Après s’être assurés que ces roches ne provenaient pas de météorites ou de comètes mais bien du volcanisme lunaire, les chercheurs ont eu la surprise de constater qu’elles contenaient des quantités non négligeables de composés volatiles comme l’eau, mais aussi le chlore, le gaz carbonique, le fluor ou le souffre.
Cailloux mouillés
Grâce à une nouvelle méthode de spectrométrie de masse permettant de déceler la présence de l'eau en très faible quantité, ils ont mesuré que les verres lunaires renfermait environ 50 ppm (partie par million) d’eau. Cela peut sembler faible quand on sait que la roche constituant le manteau terrestre contient 500 à 1000 ppm d’eau.
Toutefois, on sait aussi que lorsqu’il a été éjecté en surface - il y a au moins 3 milliards d’année-, le magma du manteau lunaire était si chaud (environ 7.000°C) qu’il a probablement laissé échapper une grande partie de ses constituants volatils comme l’eau ou le CO2. En tenant compte de ce «dégazage», les chercheurs ont ainsi estimé que la concentration en eau du manteau lunaire doit être comprise entre 260 et 700 ppm. Bref, il semble que le manteau et la croûte de la Lune ont dû, lors de leur formation il y a quelque 4,5 milliards d'années, contenir une quantité d'eau comparable à celle de la Terre.
Mais d’où vient cette eau ?
«Ces résultats soulèvent de nombreuses questions», commente dans «Nature» le géologue français Marc Chaussidon. «Qu'est devenue toute cette eau durant la formation de la Lune? Et si la Lune n'est pas totalement sèche, d'où cette eau vient-elle?»
En effet, le chercheur rappelle que la concentration en deutérium de l’eau contenue dans le manteau terrestre indique que celle-ci a une origine exclusivement «spatiale», apportée par les millions de météores qui ont bombardé massivement la terre primitive après la formation de la Lune. «Est-il alors possible que l’eau lunaire provienne de ce même bombardement?» s’interroge Marc Chaussidon , «Pour en avoir le cœur net, la prochaine étape consistera à mesurer le rapport deutérium/hydrogène dans les verres lunaires».
Par ailleurs, la détection de glace sera l'une des missions de la sonde Lunar Reconnaissance Orbiter (LRO) de la Nasa, qui doit cartographier avec une grande précision la surface de la Lune pour préparer une reprise des vols habités à l'horizon 2020.
REUTERS ¦ Un avion passe devant la pleine lune au dessus de Budapest, Hongrie, le 25 septembre 2007.
Yaroslav Pigenet
20Minutes.fr, éditions du 10/07/2008 - 11h58
dernière mise à jour : 10/07/2008 - 13h25